Chaque 9 août, la Journée internationale des peuples autochtones instaurée par l’ONU est l’occasion de rendre hommage à celles et ceux qui, à travers le monde, protègent des cultures millénaires et des écosystèmes uniques.
C’est aussi l’occasion, en tant que professionnel.le.s du tourisme et voyageur.euse.s, de réfléchir à notre rôle : en quoi le tourisme peut-il nuire aux peuples autochtones ? Et surtout, comment le tourisme équitable peut-il devenir un véritable allié de leurs luttes ?
Contrairement au terme « indigène », souvent associé à une connotation coloniale, le mot « autochtone » désigne les populations originaires d’un territoire, porteuses de traditions, de savoirs et de modes de vie ancrés dans leurs terres ancestrales.
Les peuples autochtones représentent environ 476 millions de personnes réparties dans plus de 90 pays. Selon l’ONU, bien qu’ils ne constituent que 6 % de la population mondiale, ils protègent 80 % de la biodiversité de la planète. Ce sont les gardiens de plus de 5 000 cultures distinctes et d’une immense diversité linguistique, puisque la grande majorité des 7 000 langues vivantes sont parlées par des peuples autochtones.
Les peuples autochtones font partie des populations les plus marginalisées : ils subissent discriminations, spoliations, violences… Leurs droits, et notamment celui de continuer à vivre sur les terres de leurs ancêtres, continuent d’être bafoués.
Le tourisme peut se transformer en outil d’oppression. Folklorisation, expulsions, spoliation culturelle et économique : dans bien des cas, les peuples autochtones ne sont pas les bénéficiaires du tourisme, mais ses premières victimes.
Voici quelques témoignages recueillis par l’ONG Survival International, qui lutte pour les droits des peuples autochtones :
« Ils nous ont expulsés sous prétexte que notre présence nuisait à la forêt. Aujourd’hui, il y a des jeeps de touristes qui circulent sans cesse. Ne sont-elles pas plus dérangeantes pour les animaux que nous ? » – Témoignage d’un membre du peuple Jenu Kuruba, Inde
« Regardez les brochures touristiques : vous y verrez des paysages africains sublimes, mais vides. Aucun village, aucun être humain, ni de bétail. Parfois, les habitants sont même effacés par Photoshop. » – Mordecai Ogada, expert kényan de la conservation
« L’idée de « nature sauvage » est un mythe colonial. Ces terres que l’on prétend vides sont en réalité les lieux de vie de communautés entières. » – Fiore Longo, Survival International
Ces dérives ne sont pas marginales. Elles sont liées à une vision du monde où la nature serait à préserver… sans les humains qui y vivent depuis des générations. C’est ce que Survival International appelle la « fortress conservation » : créer des parcs naturels en excluant les habitants qui les ont toujours protégés et ont su en exploiter durablement les ressources.
De plus en plus de voyageur.euse.s souhaitent visiter des destinations dans lesquelles vivent des minorités ethniques. La raison principale : leur exotisme et de leur formidable richesse naturelle et culturelle. Les modes de vie alternatifs des peuples autochtones représentent un attrait pour de nombreux touristes cherchant des expériences authentiques, loin d’une mondialisation homogénéisante.
Avant de visiter un territoire habité par un peuple autochtone, il est essentiel de s’informer et de faire preuve de discernement pour éviter de perpétuer, malgré soi, le racisme et le colonialisme.
L’ONG Survival International propose quelques conseils précieux :
À faire :
À éviter :
Dans de nombreuses destinations, des communautés autochtones s’organisent pour mener projets de tourisme communautaire. Les habitants décident donc de l’accueil, de l’organisation, des activités proposées. Le voyage devient un levier de développement local, un complément de revenu qui ne remplace pas les activités traditionnelles, mais les soutient.
Le tourisme communautaire peut également permettre aux communautés autochtones de valoriser les savoir-faire, les langues, les récits, les modes de vie. C’est un outil d’autodétermination. Ainsi, les peuples autochtones choisissent comment ils veulent être représentés, avec qui ils veulent travailler, et dans quelles conditions.
Les voyagistes porteurs du Label Tourisme Equitable s’engagent pour être des alliés des projets touristiques portés par les communautés autochtones. Ils défendent un tourisme respectueux, émancipateur, et qui défend les droits de personnes. Le tourisme équitable est basé sur la co-construction des séjours avec les communautés, la juste rémunération, et la valorisation des cultures locales.
Enfin, le tourisme équitable peut jouer un rôle politique. En mettant en lumière les luttes locales des peuples autochtones (accaparement des terres, discriminations, menaces environnementales), il contribue à leur donner une visibilité internationale.
Cet engagement dépasse le champ du tourisme. D’autres organisations du commerce équitable soutiennent également les peuples autochtones. C’est le cas, par exemple :
Ces modèles montrent qu’il est possible de consommer, voyager, s’émerveiller sans exploiter. Et que le respect des peuples autochtones va de pair avec la préservation de la planète.
> Bien choisir son séjour écotouristique : évitez les pièges en optant pour le tourisme équitable !
Les peuples autochtones ne sont pas des vestiges du passé. Ils sont des acteurs vivants de la diversité culturelle et écologique mondiale et leurs droits doivent être protégés.
En tant que voyageur.euse.s, nous avons un rôle à jouer. Choisir le tourisme équitable, c’est faire le choix de rencontrer l’autre dans le respect et de contribuer à préserver des modes de vies singuliers.