Pourtant, bien avant que ce terme ne soit popularisé, des communautés locales en France et à l’international vivaient déjà selon les principes que nous appelons aujourd’hui « tourisme durable » ou « faible impact ».
Ces pratiques n’étaient pas théorisées. Elles faisaient plutôt partie d’un mode de vie, transmis de génération en génération.
Le paradoxe est qu’aujourd’hui, la plupart des modèles dominants de durabilité et de labélisation sont pensés en Europe ou en Amérique du Nord, puis imposés ailleurs. Résultat, cela cause :
Ainsi, des communautés qui vivent durablement depuis toujours se retrouvent marginalisées ou jugées « non-conformes ».
À titre d’exemple, une chambre d’hôte sobre, où rien n’est gaspillé, ne figurera pas parmi les écolodges « certifiés ». A contrario, une maison traditionnelle en bois ou en terre, conçue pour laisser circuler l’air, sera jugée « archaïque », tandis qu’un écolodge climatisé alimenté par panneaux solaires obtiendra un label « vert ».
Est-ce vraiment cela, la durabilité ? Ou est-ce simplement une nouvelle forme d’effacement des savoirs locaux ?
Si l’on veut construire un tourisme durable, basé sur la sobriété, l’hospitalité et l’authenticité des rencontres, il est temps de changer de regard. Cela passe par trois évolutions essentielles :
Car la durabilité n’est pas la recherche de perfection. Elle repose sur trois valeurs fondamentales : la responsabilité, la résilience, et la réciprocité. Il s’agit de valeurs universelles, mais que de nombreuses communautés pratiquent sans en faire un slogan marketing.
Face à ces paradoxes, une question se pose : faut-il jeter les labels à la poubelle ?
La réponse est non.
D’un côté, certains acteurs affirment : « Moi, je n’ai pas besoin d’un label, j’agis«
Ils ont parfois raison, dans la mesure où de nombreux labels de tourisme ne sont que des listes d’indicateurs de conformité. Ces mêmes indicateurs sont souvent vides de sens dès lors que l’on travaille avec des organisations de tourisme communautaire, autochtones, ou que l’on pratique le tourisme chez l’habitant-e, faisant la part belle à la rencontre avec des actrices et acteurs de la vie locale, non-professionnel.le.s du tourisme. Mais ce discours peut aussi masquer des pratiques opaques, et éviter toute remise en question. Dans ce sens, les labels indépendants restent essentiels pour garantir la sincérité et la crédibilité des engagements.
Les labels de tourisme doivent évoluer. Pour rester pertinents, ils doivent :
C’est dans cette optique que l’ATES (Association pour le Tourisme Équitable et Solidaire) a conçu le Label Tourisme Équitable.
Contrairement aux modèles dominants, ce label a été pensé pour :
Le tourisme équitable et solidaire repose sur un principe simple mais fondamental : mettre la dignité et les savoirs locaux au centre. Reconnaître la valeur de chaque culture. Marcher ensemble vers des modèles de voyage réellement durables, qui ne se contentent pas de cocher des cases mais qui respectent les territoires et celles et ceux qui y vivent.
En définitive, la question n’est pas de choisir entre labels ou pratiques locales. L’enjeu est de bâtir un nouveau langage de la durabilité :
Parce qu’au fond, la durabilité, ce n’est pas seulement une affaire de certifications ou de communication. C’est une manière de penser la relation entre les humains, la nature et l’hospitalité. Une relation que de nombreuses communautés ont préservée, et que le tourisme responsable doit désormais apprendre à écouter et à valoriser.
Les labels de tourisme durable sont utiles, mais insuffisants s’ils continuent d’imposer une vision uniformisée et déconnectée des réalités locales. Pour un tourisme vraiment durable, sobre et hospitalier, il est urgent de reconnaître les pratiques des communautés et les savoirs locaux qui incarnent depuis toujours la responsabilité, la résilience et la réciprocité.
Redonnons la durabilité à celles et ceux qui en sont les véritables gardiens !